Mon nom est Isabelle Ryckbost, je suis la secrétaire générale d’ESPO depuis 2013. En cette capacité, je représente les intérêts des autorités portuaires européennes auprès des institutions européennes. ESPO représente tous les ports maritimes de la totalité des Etats membres de l’UE ainsi que de la Norvège. Nous avons aussi quelques membres observateurs, notamment l’Albanie, l’Islande, l’Ukraine, Israël et le Royaume-Uni.

 

  • Quel est votre quotidien et qu’appréciez-vous dans ce dernier en tant que femme dans le maritime ?

 

Au quotidien, nous suivons toute la législation européenne importante pour les ports maritimes et sommes, en cette capacité, en contact régulier voire quotidien, avec les décideurs européens. Pour bien comprendre et représenter nos membres portuaires, nous sommes, d’autre part, dans un dialogue permanent avec nos membres. Alors que les chiffres indiquent clairement que les femmes sont sous-représentées dans le monde maritime et portuaire ainsi que dans celui du transport, je dois dire que les femmes sont assez bien représentées dans les autorités portuaires et occupent des fonctions stratégiques. Ceci dit, dans le contact avec le monde portuaire ainsi que politique, je pense qu’ « être une femme » ne compte plus comme avant. Je pense qu’il y a eu une évolution.

 

  • Quel a été l’élément pivot ou le fait marquant de votre carrière ?

 

J’ai travaillé 15 ans au Parlement Européen en tant qu’assistante parlementaire où je m’occupais principalement des dossiers liés au transport et aux ports ainsi que de quelques dossiers importants dans le domaine environnemental. Grâce à cette position, j’ai appris à comprendre comment arriver à des compromis, comment l’Europe fonctionne et surtout, j’ai appris à « lire » les différences culturelles existantes au sein de l’Europe. Au niveau européen, trouver un compromis implique de comprendre les différences politiques mais aussi les différences nationales et de trouver un dénominateur commun. Juriste au départ, ce travail au Parlement Européen m’a appris à marier le monde strictement juridique avec le monde réel et politique en charge de trouver des solutions aux grands enjeux. Ce travail m’a aussi appris à expliquer et communiquer les choses d’une façon simple en évitant les termes juridiques difficiles. En conclusion, je pense que cette expérience a été une bonne base pour la fonction que j’occupe aujourd’hui.

 

  • Être une femme dans ce milieu majoritairement masculin, quel bilan dressez-vous ?

 

Je ne veux pas minimiser le défi qu’ont les femmes de fonctionner dans un monde majoritairement masculin, mais je voudrais quand même préciser que je n’ai jamais considéré le fait d’être une femme comme un obstacle majeur dans mon travail à ESPO. En fait, le monde portuaire et maritime est très fortement un « people’s business ». Les autorités portuaires doivent travailler non seulement avec tous les acteurs dans la chaîne logistique mais aussi avec les autorités locales et toute la communauté autour des ports. Je pense que, dans cette perspective, avoir une bonne représentation homme-femme est très important. De plus, en tant que femmes, on remarque peut-être certaines choses que les hommes ne voient pas et vice versa. Je pense que notre approche peut être différente et cela doit être vu comme une richesse. A ESPO, nous faisons depuis quelques années le monitoring de la représentation des femmes et des hommes dans nos réunions, aussi bien aux réunions techniques comme celles sur la thématique du développement durable ou de la gouvernance des ports qu’aux réunions plus stratégiques comme celles du comité exécutif et de l’assemblée générale.

Les chiffres montrent un bilan positif avec une augmentation de la part des femmes ayant assisté aux réunions en 2020, à l’exception du comité exécutif, qui a connu une baisse de seulement 2%. Tous comités techniques confondus, les femmes représentent 35,10% des professionnels portuaires ayant participé aux réunions de l’ESPO en 2020. Cela montre une augmentation globale de 4 % par rapport à 2019 et 2018. En novembre 2020, l’assemblée générale d’ESPO a élu Annaleena Mäkilä, directrice générale, PDG de l’association des ports finlandais, à la présidence d’ESPO. Elle est la première femme à présider l’organisation. Le bureau du secrétariat d’ESPO compte plus de femmes que d’hommes (6 contre 3).

 

  • Quels conseils donneriez-vous à une femme qui s’oriente vers un des métiers du maritime ?

 

Si vous êtes intéressée par un travail, un métier dans le secteur maritime et/ou portuaire, allez-y. Ne vous laissez pas effrayer par l’idée reçue que c’est un monde masculin.